L’Autorité de sûreté nucléaire protège depuis 10 ans les travailleurs, le public et l’environnement dans tous les secteurs touchés par le nucléaire.
Parmi les onze divisions du territoire français, celle de Nantes assure le contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection dans les neuf départements des régions Bretagne et des Pays de la Loire. Le pouvoir de l’ASN est l’information et la portée médiatique que peut avoir cette dernière.
Selon Pierre Siefridt, chef de la division nantaise, « l’ASN n’est ni là pour alerter, ni rassurer, mais informer ». Tout événement donne lieu à une transmission du renseignement. Les incidents sont classés sur une échelle de 0 à 7. A partir de 1, l’ASN rend compte de la cause et de l’ampleur du problème. Toute unité qui touche au nucléaire est également classée au niveau de la radioprotection. Les niveaux vont généralement de 1 à 3. Il y a deux manières de jauger : le danger véritable que peut représenter un secteur du nucléaire, et le surclassement.
Ainsi, le laboratoire Subatech à Nantes a écopé d’un surclassement, par manque de culture de radioprotection. Plus en détails, l’entreprise utilisait une source radioactive « émetteur alpha » qui perdait de l’étanchéité. Malgré trois identifications successives, le laboratoire continuait à utiliser et à contaminer ses outils. « C’est la première fois en 10 ans que l’on voit ça » explique Pierre Siefridt. C’est cette rareté et ce manque volontaire de culture de radioprotection qui a justifié son surclassement au niveau 1.
La médecine nucléaire : une inégalité des personnes face aux radiations
Les gens ne sont pas égaux face aux irradiations. « Tout le monde ne bronze pas pareil, face au soleil. De même, la sensibilité de chacun peut varier face aux doses d’ions apportée en radiothérapie ». Il ne s’agit chaque fois que de petites doses, mais elles peuvent s’ajouter les unes aux autres. Elles sont suffisamment diluées pour ne pas être dangereuses pour la population néanmoins certaines personnes peuvent développer des rougeurs ou des maladies. En cause, des facteurs génétiques.
Pour le moment, lors des traitements contre le cancer, les visites médicales hebdomadaires servent à évoquer les effets secondaires. Si des brûlures importantes apparaissent, le spécialiste peut reconsidérer le plan de traitement, l’alléger ou encore le réorienter. Il s’agit donc d’une prise en compte à postériori que les experts du médical nucléaire veulent inverser. L’idée est de prendre le problème en aval grâce des traceurs génétiques ou à travers des examens pour adapter les plans de traitement. Néanmoins cette méthode reste encore de l’ordre du théorique.
Un sujet encore débattu
Dans le domaine médical, la radioprotection s’est instruite pas à pas, en concertation avec les professionnels. Avec le développement des actes radioguidés en chirurgie, il est nécessaire de former les cardiologues, neurochirurgiens, et autres spécialistes, à la culture de la radioprotection. Aujourd’hui, c’est surtout avec la radiologie interventionnelle que les doses délivrées aux patients sont les plus importantes, à terme.
Alors la médecine nucléaire représente-t-elle des risques ? Le secteur s’est vu attribué le critère « à risques majeurs », certes, mais il s’agit d’un risque hypothétique. Si pour certains experts l’ASN a surévalué le danger, pour d’autres les effets seraient supérieurs à ce qui est envisagé. La réalité étant que les études à l’échelle de la population ne sont pas conclusives. Pour réduire tout risque, les appareils doivent être réglés pour optimiser les protocoles et les expositions, justifiées et réduites au maximum. Le fait de s’assurer que tout traitement est justifié incombe au médecin réalisateur selon le droit français. Il peut réorienter le patient vers d’autres types d’examens qui n’impliquent pas une radio.
Former à la radioprotection
La formation au sens large du terme couvre tous les domaines de médecine en rayonnement ionisant. En radio interventionnelle, on remarque que la radioprotection des patients est moins bien prise en compte. Il s’agit d’un problème rencontré uniquement en imagerie interventionnelle. Il y a 10 ans, ces mêmes constats étaient faits en médecine nucléaire. Aujourd’hui, les médecins portent une bague et des lunettes plombées. Mais pour les nouvelles techniques, où les enjeux médicaux semblent plus importants que la radioprotection, il reste des progrès à faire. Ainsi, un cardiologue va plus facilement essayer de sauver son patient d’un arrêt cardiaque que d’une irradiation. Il s’agit de logiques différentes, qui prennent en compte le nucléaire mais en second lieu.
Les programmes d’inspection sont réalisés de manière pluriannuelle. Pour la radiothérapie, le plan est triennal. Après les accidents d’Epinal et de Toulouse en 2005 et 2006, les enjeux ont montré leur importance. Fin 2016, les 85 établissements de radio interventionnelle auront été visités par l’ASN, qui s’était donné pour objectif de tous les voir.
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Retrouvez ci-dessous l’interview du 27 juin 2016, de Pierre Siefridt, chef de la division nantaise de l’ASN.